Regression des résolutions écrans

Dans un semblant de progrès technologique continue, les assembleurs d'ordinateurs portables dupent les utilisateurs désireux de se lancer dans la grande piscine du web.

Enfermé dans un format (4:3) unique, les comparaisons entre écrans se sont limités, jusqu'ici, à celle de la largeur d'écran. Au cours de ces dernières décennies, les formats se sont succédés à coup de 320x240, 640x480, 800x600, 1024x768… A chaque nouvel achat, une sensible sensation d'amélioration du confort de navigation, une meilleure visibilité du contenu affiché s'imposaient à l'heureux acquéreur.

Pour suivre les téléviseurs, vendre de l'innovation, arrivent les "widescreen", sensés nous offrir une vision plus large du monde virtuel. Convaincu par la publicité de la cohérence avec le champ de vision humain, motivé par la lecture de productions cinématographiques lors de ces interminables voyages ferroviaires, le consommateur se dote d'un appareil ne correspondant en aucun cas aux pratiques à développer pour naviguer sur la toile.

Admirant le joujou, fier de son concentré de technologie, on l'observe penché, le dos courbé, les yeux plissés, l'index taquinant la molette. Quel informaticien, aujourd'hui, accepterait qu'on lui propose un espace de travail limité à 1024x768? En effet comment est-il possible de rédiger un document ou encore de lire le contenu d'un site sur une résolution aussi basse quand on connaît la surface concédée aux barres d'outils. Pourtant, sûr de posséder la largeur de 1280 pixels de circonstance, c'est bien avec la hauteur antédéluvienne de 768 pixels qu'il se pavane dans le TGV.

Il est d'une évidence rare que d'admettre que le passage de dalles d'ordinateurs portables pouvant atteindre les 1280x1024 (et plus) à des formats généralisés de 1280x800 est une regression significative des technologies proposées aux utilisateurs. Le marché n'aura retenu que les avantages de portabilité des produits en sacrifiant un élémentaire confort minimum de lecture de l'information ; c'est-à-dire l'usage des ordinateurs comme simples plate-formes multimedia, pour les films et les jeux, plutôt que comme un outil de communication, pour la visualisation et la création. Plus économiquement, il vend des écrans avec une résolution plus basse pour le même prix et fait passer le format pour une innovation.

La ligne de flottaison étant réhaussée, l'initiation des visiteurs à la lecture hypertexte va se retrouver limitée par la vente des machines ludiques par les assembleurs. Les liens inférieurs des blogrolls disparaissent de la surface et perdent en fréquentation, les textes argumentés sont survolés par la fatigue du défilement vertical… Si la considération de ce nouveau phénomène n'est pas considéré aussi bien au niveau des interfaces de visualisation que dans la conception des sites eux-même, il est possible d'assister à une assimilation plus que partielle du principe de connectivité ainsi que d'une compréhension restreinte des points de vue exposés sur le net. Probablement une généralisation de la consultation de contenus courts et de média comme les vidéos et les podcasts que d'études poussées et de rapports travaillés.