Noam Chomsky : la dépolitisation de notre société
Une interview sévère de Noam Chomsky, fondateur de la grammaire générative. Lui, comme tous les autres, dresse le constat d'un manque d'espoir dans notre monde.
Les ouvriers ne sont pas apathiques, ils sont au contraire très sensibles à ces questions, mais ils ne savent pas quoi faire. Après la Seconde Guerre mondiale, la classe d'affaires a endoctriné la société sur l'américanisme. Celui-ci a tout emporté… les ouvriers, les églises, les écoles, les clubs sportifs, le gouvernement. Les syndicats, les partis politiques ont été éliminés. Il n'y a plus qu'un seul parti, celui des affaires, avec deux factions. C'est donc très différent des années 1930, lorsqu'on pensait qu'on pouvait réformer l'économie.
Même lui manque d'espoir ; Noam pense que la sphère financière dirige la politique et qu'elle arrive à sortir renforcée à chaque crise.
La financiarisation de l'économie, l'idéologie fanatique de l'efficacité des marchés et le pouvoir croissant du secteur financier ont précipité la crise. Mais je ne crois pas que les choses vont changer. L'industrie financière va sortir plus concentrée, avec quelques dégâts sociaux. Au lieu d'avoir 10 banques trop importantes pour faillir, on en aura deux. Mais le système demeure le même. Le gouvernement continue de les protéger, cela crée des incitations perverses et ils s'en sortent plus puissants que jamais. Ce qui n'est pas une surprise puisqu'ils décident des programmes politiques.
Résultat, l'engagement politique devient quasiment nul. Les slogans publicitaires feraient voter les citoyens quasiment les yeux fermés.
Les gens épargnent plus, il y a un changement, mais l'économie ne peut pas le tolérer si son moteur est la consommation. Elle la suscite et les gens y sont poussés par cette propagande massive que sont la publicité et le marketing. C'est une façon de contrôler les personnes. En les contraignant à s'intéresser aux choses superficielles de la vie. Tout cela contribue à créer un sentiment de désespoir et d'aliénation. Lors de la dernière élection, 98 % des personnes titulaires d'un siège ont été réélues au Congrès. C'est un chiffre choquant quand on sait que le niveau d'approbation du Congrès ne dépasse pas 15 %. C'est l'une des multiples indications de la dépolitisation de notre société.
Je pense que le constat est dur mais juste. Pour en savoir plus, je conseille la lecture de l'économie de l’hypermateriel et psychopouvoir.
Lire Noam Chomsky : "Il n'y a plus de sentiment d'espoir" par Noam Chomsky.