Publicité Atmos de Volkswagen, un court-circuit culturel

Les agences de publicités manquent d'originalité. A force de vouloir faire dans la polémique leurs publicités deviennent de plus en plus litigieuses.

La dernière publicité du constructeur de voiture, Volkswagen, promeut un avis, soit disant deuxième degrés, sur les réalités des initiatives concernant la limitation de la pollution. Le syndicat national de la publicité nous éclaire :

Loin des discours creux, Volkswagen veut assumer que malgré tous les efforts, une voiture aura toujours un impact sur son environnement. Et s’il est vrai que la marque propose des modèles référents en termes de consommation et de rejet de CO2, il est aussi vrai qu’on devrait plutôt parler de réduction que d’émission zéro. C’est cette honnêteté de ton qui différencie Volkswagen de ses concurrents, car la marque évite le simple discours marketing. Volkswagen ne prétend pas pouvoir changer le monde. Avec la Passat BlueMotion, la marque propose des solutions pour faire avancer les choses un peu plus chaque jour.

C'est exactement mon avis, Volkswagen fait preuve d'une honnêteté de ton modèle. Cette publicité montre un groupe de personnes prenant les problèmes un par un et essayant de les résoudre par des méthodes radicales et pour le moins ridicules. Elle met sur même plan les émissions de CO2 liées à l'hygiène, à la cuisson, au chauffage et au déplacement individuel en voiture.

Ainsi, ses créateurs réussissent le coup de force de mettre au même niveau la survie humaine avec le déplacement dans une de ses voitures, c'est-à-dire l'achat égoïste d'un objet désiré. Si l'excès de sel est mauvais pour la santé, Volkswagen est comme un producteur de charcuterie qui prétendrait qu'il est impossible de réduire la teneur de n'importe quel produit à zéro (sel), que lui en a enlevé quelques milligrammes, et donc que vous pouvez continuer à vous goinfrer avec son produit ; parce qu'au fond, dites le, vous aimez ça.

Cette publicité représente d'un double court-circuit. Le premier, l'excès de sel est mauvais pour la santé, il faut en réduire drastiquement sa consommation (passer de 10 grammes à 2 grammes par jour), enlever quelques milligrammes ne change rien à l'affaire. Le déplacement individuel est trop consommateur d'énergie, il rejette des gaz qui rendent les enfants des villes asthmatiques ; il faudrait repenser les transports plutôt que de renouveler le parc automobile.

Deuxièmement, ce type de communication télévisuelle se superpose au discours de toute les associations qui essayent d'agir sur l'aménagement local des territoires. Elle dénigre les essais d'organisation communautaires pour favoriser le comportement individuel. Bernard Stiegler parle ainsi :

Un territoire est un réseau relationnel en tant que tel : c'est sa trame relationnelle, c'est-à-dire sa conjonction sociale, qui fait qu'il est un territoire et non seulement un espace géographique. La tentation d'un pouvoir centrale consiste toujours en grande part à organiser des courts-circuits pour affaiblir la conjonction sociale locale pour la sienne. Cependant lorsqu'il s'agit du marketing, il se produit un changement d'échelle : ces courts-circuits détruisent purement et simplement le symbolique, en généralisant la logique destructrice des milieux dissociés.

En gros, quand votre discours vaut 1 à l'échelle de votre famille, le discours publicitaire vaut 1000, voir 10 000, au niveau de votre village. Certes, il faut agir, se battre, y croire, mais votre action est diluée par les messages télévisuels qui, eux, proposent qu'on change d'accord, mais un petit peu (pour ne pas dire pas du tout).