De la calculabilité de nos pensées

Profitant de cette nouvelle notoriété acquise après sa plainte contre l'indépendance journalistique (française), Jean-Luc Mélenchon habite les plateaux de télévision de son discours teinté de logique sociale.

Invité de "Questions de génération" de Samuel Etienne sur France 5, notre homme politique a été confronté à des êtres dépourvus de conscience historique et civique sur notre beau pays.

Comment se fait-il que trois représentants de cette ignoble espèce aient été présents simultanément sur le plateaux ? Comment ce fait-il qu'ils monopolisaient la parole pendant que les autres essayaient vainement de se faire entendre ? Je n'ai pas la réponse, mais cette situation ressemblait avant tout à un traquenard pour Mélenchon. Je vous laisse juge de la stupidité des questions.

Ce qui me choque avant tout dans cet événement, c'est l'abaissement de nos consciences à des soucis de seule rentabilité monétaire. Comme si notre existence ne pouvait s'expliquer que par des formules de tableaux Excel.

Le niveau précaire des idéologies défendues dans les grands médias depuis quelques décennies porte ses fruits à tel point que des garçons de 19 ans puissent affirmer que les américains sont les personnes les plus heureuses du monde et que les États-Unis représentent le système à copier pour atteindre l'âge d'or.

A 19 ans, on rêve de voyages, de découvertes culturelles et d'amour entre les peuples, pas vraiment de travailler 20 heures par jour. A moins d'avoir une manière de penser dans la lignée de l'économie productiviste du "produire plus, c'est gagner plus" qui dérive aujourd'hui vers le "travailler plus, c'est gagner plus" et donc vivre mieux.

En 2010, l'humanité vit une période totalement paradoxale, celle où vous ne pouvez pas lire un journal, écouter une conversation dans le métro, regarder une publicité sans que la perspective de rentabilité ne soit évoquée. C'est comme si toute notre vie était dirigée par cette obsession du retour sur investissement ; alors même que l'économie mondiale est en train de tomber, peu à peu, dans un gouffre financier sans précédent ; c'est-à-dire que nos modèles économiques n'ont jamais été aussi mauvais.

Ce week-end, les grands médias titraient sur les quelques cendres d'un volcan Islandais ; des volcans cela fait des siècles que certains entrent en éruption, rien de fondamentalement surprenant. La santé des gens ? L'activité géologique de notre planète ? Les problématiques environnementales sur l'agriculture des pays nordiques ? Non ! Les pertes économiques des compagnies aériennes ? Les voyageurs bloqués sur une plage aux Seychelles ? L'importation d'Ananas du Ghana ? Oui !

Ainsi, seule la réalité de ceux qui travaillent pour ce grand système industriel importe. Ceux, pour qui l'investissement ne concerne pas directement l'économie productiviste, sont tout simplement écartés puis, petit à petit, qualifiés d'assistés et de faignants.

* Mais oui, mais mon bon monsieur, il faut produire plus, pour gagner plus. Produire mieux ? Je ne comprends pas.

Le pire dans tout ça est que, ceux qui travaillent, essayent de se convaincre que leur vie est géniale. Alors, qu'asservis par le système, éreintés par les cadences, ils maudissent cette société qui les exploite. Ensuite, perchés dans leur tour d'ivoire, frustrés de leur situation dans laquelle l'amitié et l'honnêteté représentent de doux idéaux philosophiques, ils en viennent à dénigrer leurs congénères.

Les raisonnements simplistes des seigneurs industriels dégoulinent dans les médias comme le chocolat sur une poire belle Hélène. Si seulement, l'occident pouvait cesser de penser à l'expansion de son territoire commercial avec son vocabulaire financier ; si seulement, l'homme pouvait devenir plus économe, penser en terme de développement humain plutôt qu'en croissance industrielle.