Alphabétisation numérique, au secours !
J’étais à Numérique en Commun[s] de Bourg-en-Bresse. Faut arrêter de se voiler la face, le numérique en France est un désastre. Et on continue de guider notre industrie sur les résultats financiers. Lisez ceci !
Sur LinkedIn, le numérique va (presque) bien. Dans la réalité, c’est pas ça. Et ce n’est même pas le numérique qui pose problème.
Pas d’argent, pas de volonté
J’étais donc dans une conférence des médiateurs numériques (les derniers de cordée, je ne sais pas), mais ceux qui sont au front devant la population chaque jour de la semaine.
On est tout content de se voir et d’organiser une conférence, mais on est pas au dernier CES avec ses dernières promesses de marché en croissance. Les élus arrivent sur scène pour dire qu’ils ont une feuille de route, que le numérique est inéluctable, mais qu’il n’y pas de stratégie industrielle pour le numérique et qu’il n’y a surtout : AUCUN BUDGET !
Non seulement, il n’y a plus de budget, mais les postes d’une bonne partie des médiateurs du numérique, dont tout le monde demande l’aide, vont disparaître. Les politiques n’en veulent pas.
On vit donc dans un univers où on voit littéralement des personnes cramer de l’argent et des terres arables pour développer le numérique en version : +++++++++++++++++++++ +++++ ++++++++++++++++++++ ++++++ +++++++++ !!!! En laissant, les citoyens livrés à eux même !
Les points marquants
Je vais vous parler de 3 points en particulier
L’accessibilité numérique
Le monde de la médiation numérique ignore (comme tout le monde), l’accessibilité numérique (et inversement). Le monde de la médiation ignorent que les organismes ont des obligations.
On sait que les outils sont de mauvaises qualité, on fait parfois remonter des erreurs à des acteurs ; mais jamais, au grand jamais, les médiateurs ne vont demander le contact du référent accessibilité d’une collectivité. Jamais, au grand jamais, faire un signalement à l’ARCOM ou à la DGCCRF.
Ainsi, les médiateurs vont être les champion du rouleau de scotch à aider des personnes à vouloir passer des rivières alors qu’il n’y tout simplement pas de pont.
Comment voulez vous ne pas perdre des personnes ?
Une éducation à marche forcée
Le parent-éducateur, voilà ce qu’on attend comme figure pour que les forces vives de la nation soient performants sur le prochain marché du travail.
L’IA est là, il faut l’utiliser, on n’a pas le choix. Mais pour que ça marche, il faut aller chercher la parents démissionnaires. J’ai lu des livres sur l’éducation de la petite enfance au collège, le parent-éducateur est une marque des classes supérieurs. Et ça l’a toujours été.
Les classes supérieures sont non seulement dans un modèle d’interactions très fréquentes avec leur enfant. Mais en plus elle possède un patrimoine financier et culturel employabilité-compatible à transmettre.
La France pousse un principe de forte d’augmentation des inégalités dans un contexte déjà fortement inégalitaire.
La culture de la culpabilisation
Dans les actions sociales qui existe sur le terrain, pour tous les sujets… en France on utilise la culpabilisation.
La France est championne d’Europe des accidents au travail. Qu’est-ce qu’un accident du travail, sinon un modèle de management où les personnes qui ont les responsabilités disent à leur employés : débrouillez vous avec les moyens du bord ?
Et bien, ce système de culpabilisation est à tous les niveaux, tous les étages.
Donc quand vous répétez à un parent précaire, qui n’a aucune perspective à apporter à son enfant, aucune fierté car détruit pas différentes expériences humiliantes, peut-être isolé… que son enfant à encore manqué l’école cette semaine et qu’il va falloir l’accompagner pour l’utilisation d’une IA responsable. Doutez vous bien que ça ne va pas marcher.
La famille entière va décrocher. On perd des élèves dans les classes, parfois 1/3 des élèves dans une classe de 3ème.
Que reste-il ?
Qui sont ces acteurs sociaux sur le terrain ? Qui sont les personnes à qui ont ne veut pas pérenniser des postes ?
Ce sont les élèves studieux de l’école publique.
Quand on culpabilise les familles, on perd des citoyens ; quand on culpabilise les médiateurs du numérique, on perd des acteurs de liens sociaux indispensables ; quand on investit pas sur l’accessibilité, on rend l’administration inefficiente.
Ce qu’il reste c’est de l’amertume, c’est de la défiance envers le système. Un médiateur très investit me disait que les personnes sur le terrain ce sont des comptes en banques, des comptes sur les services sociaux,… c’est tout leur vie qu’ils jouent au quotidien. Ils naviguent la peur au ventre.
Quand France Connect propose une page blanche après une connexion. Les personnes ferment leur onglet en pensant qua ça ne marche pas. Et quand on leur dit que si si elles étaient bien connectés, elles veulent relancer le site pour aller se déconnecter de peur de se faire voler leur compte… et donc supprimer leur compte France Connect pour ne plus JAMAIS l’utiliser.
Dernier message
Professionnels du numérique, vous êtes loin mais loin du terrain !
Quand on entend les médiateurs et les citoyens, on parle de : ceux qui conçoivent les sites, des ingénieurs qui conçoivent les interfaces (alors que c’est même pas eux directement).
Le numérique sert les personnes pour qui il est proche, il dessert les personnes qui en sont éloignés.
Je veux bien continuer à culpabiliser les personnes car, il ne savent pas cliquer. Mais, je connais la qualité des interfaces numériques pour avoir fréquenté beaucoup d’organismes ces dernières années : la conception est médiocre.
Tant qu’on rendra impuissant les organismes de contrôle et la capacité des citoyens à réclamer des services numériques de qualité ; on continuera sur ce chemin de la dégradation lente et certaine.