Le chemin qui n'existait pas

Qui ne s'est jamais retrouvé perdu dans la montagne ou sur une route de campagne, regardant une carte, des plus précises, affirmant que la carte était fausse ou antidatée ? Essayant de justifier les bifurcations précédentes à vos compagnons, arguant des positions estimées des éléments géologiques entourant, si vous ne pouviez vous retrouver sur la carte, c'est bien que le chemin n'existait pas.

La carte et le territoire

Pour pouvoir bien naviguer, il semble essentiel d'être armé d'un outil de spatialisation. Dans la conduite de projets, apparaissent les listes de tâches, gestionnaires de bugs, planning et retro-planning (…) afin de pouvoir rendre compte de ce qui a été fait ainsi que du reste à faire.

Si d'un côté vous êtes en présence d'un nombres d'éléments à réaliser pour composer un projet (le territoire), d'un autre côté, vous avez un outil de représentation déterminée qui est sensé représenter ces éléments.

Dans la théorie, tout va pour le mieux. La pensée analytique partant du principe que l'ensemble des éléments est intelligible (ce qui se conçoit bien s'énonce clairement) ; une fois ces éléments listés, il est aisé de réaliser un suivi de projet cohérent et logique.

Tel le patron dirigeant son entreprise sur les flots de l'économie libéralisée ; le chef de projet mène les membres de son équipe de port en port en déversant ses lots de produits manufacturés aux populations en liesse. Les esclaves sautant de joie sur les ponts du navire, heureux de participer à cette grande aventure humaine.

La carte n'est pas le territoire

Malheureusement, la pensée analytique ne vaut qu'en terrain déjà connu ou maîtrisé, pour des processus reproductibles ; elle ne convient pas à un environnement variable auquel il est nécessaire de s'adapter.

Ainsi, dans un environnement qualifié de complexe, il est impossible de lister l'ensemble des éléments à exécuter tant ils sont interdépendants. Il sera possible de lister un ensemble d'objectifs à atteindre (user stories), mais pas de lister les tâches à proprement dit.

Dans ce cas, les objectifs à atteindre représentent bien des éléments figurants dans une feuille de route (carte : roadmap de suivi de projet) et l’exécution des tâches représente ce qu'on appelle les compétences métiers (chemin : éléments difficile à formaliser).

Le chemin qui n'existait pas

Notre système éducatif sélectionnant les personnes en fonction de leur qualité d'analyse analytique, nos dirigeants aiment à nous tracer les chemins et paver le futur d'un bonheur que le progrès rendra sans égal.

Ces discoureurs professionnels aiment à nous réécrire l'histoire passée et nous compter comment l'histoire future se déroulera à la condition qu'on leur donne tous les pouvoirs démocratiques.

Cependant, comme cet article (Parler pour savoir ce que l'on pense) l'évoque "si ce que l’on dit, on n’a jamais eu l’intention de le dire, alors ce que l’on dit, on l’apprend seulement – comme quiconque – au moment où on se l’entend dire" ; c'est en parlant qu'on développe sa pensée, c'est en marchant qu'on fait le chemin.

Voilà pourquoi la présence d'un chef de projet dans une équipe est une sorte d'ineptie. Le chef de projet ne doit son existence qu'à une pensée qui dit que le chemin est tout tracé ou alors totalement visible sur une outil cartographique (ce qui marche pour le bâtiment) et que les membres d'une équipe ne sont que des exécutants. Mais pour un chemin qui se trace au fur et à mesure, on se retrouve dans une contradiction dans lequel il y une et une seule personne qui décide du chemin à suivre et qui en même temps le trace (le chemin).

Évidemment, quand on arrive à penser que les personnes les plus aptes à faire exécuter les lois sont ceux qui les écrivent, qu'on peut être juge et parti, on se lance dans un chemin qui effectivement n'existe pas.

Ceci expliquant que pour pas mal de développeur la réalisation d'un site médiocre, alors que pour la direction ou le client, le même site est (à court terme) parfaitement réalisé. La perception du terrain n'est pas la même.

Conclusion

Dans un environnement instable, il est nécessaire d'adapter sa route au terrain ; en fonction des obstacles de choisir les meilleures solutions pour les franchir. A défaut d'être en possession d'un outil de cartographie performant, il n'en est pas moins nécessaire d'estimer sa position à l'aide d'outils de mesure.

Pour un projet web, il est donc indispensable de constituer un panel d'indicateurs permettant de suivre l'évolution d'un site sur le web. La pertinence d'un bon tableau de bord permettra d'éviter les écueils sur des rochers affleurants.